7 raisons de laisser votre TV éteinte
En 2018, est-il encore nécessaire d’allumer la télévision pour la regarder ? Non ! Pour être informé ? Non ! Pour se divertir ? Non ! Alors, à quoi sert-elle encore à l’ère du digital triomphant ? C’est la question, la seule et l’unique qui affole les derniers étages (ceux des directions) de toutes les chaines de télévision. Tous sont soucieux de tout faire pour tenter de retrouver les téléspectateurs évaporés dans la nature digitale, sans perdre ceux qui sont encore fidèles au poste !
Symptomatique de cette course poursuite avec internet : en cette rentrée, le talk-show de TMC, Quotidien, présenté par Yann Barthès, accueille plusieurs recrues et, parmi elles, une star du digital et de YouTube : Alex Ramires qui proposera une chronique culturelle décalée. Connu pour ses versions « low cost » et hilarantes de films et de clips musicaux, Alex Ramires franchit le Rubicon et il n’est ni le seul, ni le premier. La télévision aime emprunter à Internet ses codes et ses stars comme un dernier soubresaut avant de mourir. Le talent des Youtubeurs n’est pas en cause, mais la démarche est vaine de la part des chaines de télévision car pour toute une génération ; et les suivantes suivront et amplifieront le mouvement ; il n’est plus nécessaire d’allumer la télé. En voici les 7 raisons :
1 | TV : Ne pas s’appesantir sur une mourante |
« La télé est morte », c'est une petite phrase que l’on entend de plus en plus souvent, et les français commencent à le croire. Selon un sondage publié par l’Institut BVA en 2017, près de la moitié des Français (48%) estiment que la télévision est mourante, 19% sont même persuadés qu’internet va la remplacer à brève échéance. Une affirmation « tarte à la crème » ou faut-il immédiatement rajouter : « La télé est morte, vive la télé ! » ? Les deux, mon capitaine !
Indiscutablement, la télévision en tant que technique destinée à émettre des images est désormais au plus mal, concurrencée par d’autres moyens plus légers et beaucoup plus actuels (téléphone, tablette, ordinateur, etc.). En revanche, la télévision en tant que fournisseur de programmes peut encore tirer son épingle du jeu, mais, pour cela, il faudra que les chaines de télévision ; car c’est bien d’elles dont on parle ; réussissent à faire leur aggiornamento. Mais cela s’avère une révolution copernicienne tant le mammouth télévisuel ; et pas seulement le secteur public ; est imposant, difficile à bouger et surtout extrêmement têtu. Comment et surtout pourquoi faire réellement bouger les lignes, changer de paradigme tant que le modèle économique est encore viable ? Certes, à grands coups de rabot budgétaire…
2 | TV : Choisir à qui donner son temps de cerveau disponible |
Lorsqu’en 2004 ; une éternité à l’échelle de la révolution digitale que nous vivons ; Patrick Le Lay, alors Président-directeur général du groupe TF1, affirmait vendre à ses annonceurs du « temps de cerveau disponible », non seulement, il faisait une faute de communication évidente envers les français, consommateurs de sa chaine de télévision, mais, bien plus encore, il se trompait de siècle puisqu’il laissait entendre que la télévision, média vieillissant, pouvait encore berner le téléspectateur en le captant et en lui faisant ingurgiter, sans qu’il ne s’en aperçoive, du Coca Cola. Bref, le tout puissant patron de la Une avouait sans le savoir son incompréhension des us et coutumes des générations émergentes. Non, le téléspectateur 2.0 n’est pas et ne sera plus jamais un cerveau disponible. Il fera d’ailleurs très vite comprendre au PDG de TF1 qu’il est le seul maitre du jeu face aux chaines historiques, incapables de parler à cette jeunesse à double, triple, voire même quadruple écrans.
Une rébellion qui n’est pas étonnante quand on sait que les téléspectateurs n’ont pas (ou plus) une passion démesurée pour la publicité. Selon un sondage OpinionWay, trois quarts des Français disent ne pas être attentifs à la publicité à la télévision. Pire encore, une majorité de français profitent des pages de publicité pour faire autre chose, 89 % des téléspectateurs quittent même la pièce où se trouve la télé pour vaquer à d’autres occupations (cuisine, toilettes, etc.), 85 % changent de chaine et même 68 % baissent ou coupent le son.
3 | TV : La télévision n’est pas l’écran des Millennials |
Vous avez entre 15 et 34 ans ; bref, vous êtes un Millennial ; et vous ne regardez que très peu la télévision. Eh bien, sachez que vous êtes extraordinairement banal. En effet, vous n’êtes pas les seuls, des cas isolés dans cet univers ultra connecté où vous êtes sollicités de toute part et en permanence. Une étude de 2016 démontre que vous ne regardez plus la télévision que 2H14 par jour contre 3H40 pour un téléspectateur moyen. Pas étonnant puisque vous êtes LA génération digital native, vous avez donc bien d’autres écrans à regarder en priorité, ne serait-ce que votre téléphone portable !
Autant dire que les chaines de télévisions s’arrachent les cheveux pour tenter de vous satisfaire. Il faut dire que l’enjeu est de taille puisque vous représentez tout de même près de 17 millions de consommateurs. Le problème ? La télé n’est tout simplement plus ni le bon média, ni le bon format et encore moins le bon rythme pour vous. Qui, entre 15 et 34 ans, peut aujourd’hui regarder, à 21h08 précisément, une émission de plus de 2 heures, entrecoupée de publicités, et réalisée pour une autre cible que la vôtre (la ménagère) alors que vous êtes plus intéressés par le visionnage, quand vous le décidez, d’une vidéo de 3 minutes maximum, adblockée, pensée et réalisée pour votre génération et surtout par quelqu’un de cette même génération ? La réponse est évidemment dans la question…
4 | TV : Ne plus subir le diktat de la ménagère |
Chaque année, la télévision engrange près de 3 milliards de recettes publicitaires. Une manne financière qui reste importante malgré le déclin de ce média. Et comment les chaines de télévision se partagent-elles cette enveloppe ? Au bon vouloir de la célèbre « ménagère de moins de 50 ans » qui fait la pluie et le beau temps sur les programmes. Une ménagère qui est certes en constante évolution puisque, depuis 10 ans, cette dernière a vu son appellation évoluée en « femme responsable des achats » puis en « femme responsable principale des achats du foyer », pour être, désormais, « le ou la responsable des achats ». Mais, quelle que soit l’appellation employée, cela ne change rien au mécanisme destructeur pour la créativité et surtout pour l’attractivité de ce média auprès des millennials.
Sur le principe, rien n’a redire car la ménagère est une cible large pour un média de masse. En revanche, on ne peut que regretter que ces fameuses ménagères de moins de 50 ans ne représentent que 20% des 59 millions de Français équipés d'une télévision. Seulement 11 millions de femmes sont donc les directeurs des programmes de tous ce que nous regardons… ou pas !
Et le problème est bien là : vous vous en doutez, un ciblage aussi large laisse forcément sur les bas-côtés des téléspectateurs orphelins qui ne se retrouvent pas dans la programmation des chaines de télévision. Ils sont alors dans l’obligation d’aller voir ailleurs et, ça tombe bien, internet leur tend les bras !
5 | TV : Il est possible de regarder la télé différemment |
Pas besoin d’avoir fait HEC, un simple tuto glané sur Internet suffit : il est aujourd’hui possible de ne pas avoir de télévision et pourtant de la regarder quand même. Que ces moyens soient parfaitement légaux ou qu’ils relèvent de la bidouille.
Restons-en à la légalité et vous comprendrez que les constructeurs de téléviseurs peuvent avoir quelques sueurs froides. Le plus connu, le plus ancien, même votre mère ou votre grand-mère l’utilise, le replay. Un outil qui abroge l’une des difficultés d’utilisation de la télévision : les horaires. De plus, grâce aux replays, vous avez aussi le choix du support : téléphone, tablette, etc. Bref, avec le replay, c’est où vous voulez et quand vous voulez… et c’est gratuit, après quelques pages de pubs tout de même !
Et si vous voulez vous passer de télévision (l’appareil), mais regarder tout de même la télévision en direct, une application comme Molotov vous permet d’accéder à toutes les chaines de télévision sur le support de votre choix. Lancée en 2016 par le créateur d’Allociné, Jean-David Blanc, et Pierre Lescure (ex-Canal+), l’application réinvente la façon de consommer la télévision.
Malgré quelques restrictions demandées par les groupes télévisuels (contrôle du direct, etc.), presque tous jouent le jeu, la preuve qu’ils prennent en compte, même à la marge, les évolutions de consommation des téléspectateurs. Une application qui fait pourtant concurrence aux propres sites des chaines qui proposent tous de visionner en streaming leurs directs. D’autres applications font le même travail, ou presque, mais sans l’extrême facilité d’utilisation de Molotov : Captvty, Watch TV et Freetux TV.
6 | TV : Internet fait de la télé mieux que la télé ! |
Le premier et plus gros concurrent de la télévision a longtemps été Youtube. Le site web d’hébergement de vidéos, racheté en 2006 par Google pour plus de 1,5 milliards de dollars, donne le tournis : plus d’un milliard d’utilisateurs uniques par mois et, en 2017, la plateforme franchit le cap du milliard d’heures de vidéos vues quotidiennes. Si pendant longtemps les chaines de télévision ont pris le site californien pour un possible fossoyeur de leur propre business ; TF1 a même tenté de contrer le géant américain avec wat.tv avant de jeter l’éponge ; elles collaborent désormais avec le site d’hébergement en y créant leurs propres chaines YouTube. C’est par exemple le cas de TF1 avec The Voice.
Mais qu’on ne s’y trompe pas, le concurrent principal des chaines de télévision n’est plus seulement YouTube ; un supermarché de la vidéo où l’on trouve le meilleur et le pire ; mais aussi et peut-être surtout, la vidéo à la demande sur abonnement qu’il s’agisse de sites comme Netflix, Amazon Prime Vidéo ou encore d’OCS. Pourquoi ?
Tout simplement car pour la première fois la concurrence est certes économique, mais il s’agit plus encore d’une bataille d’images extrêmement fratricide. En effet, dans ce combat, la qualité de la production digitale bat désormais à plate couture les productions des chaines traditionnelles européennes (et parfois même américaines) par leur esthétisme et leur audace. Sur ces plateformes, pas de ménagères de moins de 50 ans pour dicter les scénarios, les millennials s’y reconnaissent donc, butinant la ou les séries, documentaires ou talk-shows les plus en adéquation avec leurs goûts et leur génération !
7 | TV : Une bonne façon de soutenir le slow media |
Dernière bonne raison de ne plus allumer la télé : et si se passer de la télé atténuait aussi les dérives du web ? Convenons-en, cela mérite une petite explication : Internet est à l’origine du meilleur, mais aussi du pire en matière d’information. Le pire ? Les fake news et l’emballement médiatique pour tout et parfois même n’importe quoi. Et le problème, c’est que la télévision traditionnelle ; toujours soucieuse de ne pas être en reste et de ne pas se laisser dépasser par sa petite sœur digitale ; sert volontiers de caisse de résonance à ce bouillonnement d’informations pas toujours parfaitement vérifié. Bref, la télé amplifie encore un phénomène qui n’en a pourtant pas besoin !
Ainsi donc, in fine, éteindre sa télé pourrait bien être une arme efficace, un geste démocratique, afin ne pas succomber quotidiennement aux fake news et aux emballements puérils,et tenter par la même occasion de donner sa chance à un phénomène nouveau sans doute idéaliste mais inspirant que l’on appelle le slow media.
De quoi s’agit-il ? C’est un mouvement qui prône une utilisation plus modérée et moins rapide des outils informatiques dans la production journalistique afin d’offrir aux internautes, téléspectateurs, auditeurs et lecteurs, une information plus sérieuse et mieux vérifiée.
Preuve que la télévision commence à comprendre ses dérives, elle se lance de plus en plus dans le fact checking (littéralement, la vérification des faits) et le met en scène. Evidemment son bouc émissaire favori reste le web, une façon de mettre en doute le sérieux de la toile que les médias traditionnels, la télévision en tête, se pressent pourtant d’imiter, de piller et de copier sans vergogne et parfois sans aucun recul. Pour autant, les téléspectateurs ne sont pas dupes, préférant de plus en plus se tourner vers l’original (le web) plutôt que vers la copie (la télé) quels qu’en soient ses défauts !
Commentaires