Google Car et voitures autonomes : préparez-vous à 7 révolutions
Il y a une centaine d’années, les automobiles ont chassé les charrettes et les diligences des rues et des routes. D’ici une dizaine d’années, les Google Car et leurs avatars vont expulser les voitures individuelles des villes. Et ce n’est qu’une des sept révolutions qui nous attendent…
Elle n’est pas très belle, mais elle a un sacré potentiel. La Google Car développée depuis six ans par la firme de Mountain View a déjà parcouru plus de trois millions de kilomètres et n’a encore tué personne. Il y a bien quelques accidents, mais l’intelligence artificielle embarquée à bord de ce drôle d’engin semble être innocente des accrochages, à une exception près.
Cela fait six ans que Google travaille sur ce projet et l’entreprise n’est plus seule sur le coup. Audi, Mercedes, Renault, PSA, Ford se limitent encore à la conduite assistée. Tesla en revanche vient d'annoncer son passage à la conduite autonome sur ses modèles. Google semble cependant encore avoir quelques longueurs d’avance sur ce qui pourrait bien devenir la plus grande révolution dans les transports depuis… l’invention de la roue.
J’y vais fort ? A peine. Avec les commentaires éclairés de Pierre Paperon, chercheur et spécialiste de l’innovation digitale, voici à quoi vont probablement ressembler les années 20 (ou 30)... Vous pensez que c'est impossible ? En 1900, il y avait 80.000 chevaux à Paris (et 618 voitures). Le 11 janvier 1913, c'est l'ultime trajet du dernier omnibus hippomobile de la capitale. Et plus de 11.000 véhicules à moteur circulent. L'automobile a gagné le match en moins d'une génération..
1 | Il y aura beaucoup moins de morts sur les routes |
Combien ? Impossible à chiffrer. Mais on sait en revanche que sur un million 200.000 personnes qui meurent chaque année dans des accidents de la route, 90 % ont perdu la vie en raison d’une erreur de conduite… Ça laisse de la marge. Comme le dit Bryant Walker Smith, prof de droit d’’ingénierie à l’université de Caroline du sud : « Est-ce que je me sens concerné par tout ce qui pourrait aller de travers avec une voiture en conduite automatique ? Oui, mais je suis surtout terrifié par tout ce qui se passe avec tous ces conducteurs humains ».
Imaginons donc 90 % d’accident en moins… C’est 920.000 vies sauvées dans le monde (et probablement autant d’handicapés en moins). En France, les conséquences sur la santé, le trou de la sécu… et le coût des assurances seraient aussi phénoménales. A côté des tués de la route, il y a de nombreux blessés dont certains gardent des séquelles toute leur vie (le ratio est d’une personne tuée pour huit blessés hospitalisés). Le coût de l’insécurité routière serait de l’ordre de 47 Md€, soit 2,2 % du PIB d’après l’observatoire national interministériel de la Sécurité routière (page 34 de son rapport annuel 2015).
Oui, nous pourrions économiser des vies et des milliards… et les compagnies d’assurance en perdre autant.
2 | Il y aura beaucoup moins de véhicules dans les rues |
Et pas qu’un peu. 90 % des voitures peuvent disparaître (et les bus aussi) d’après une étude du Forum international des transports qui dépend de l’OCDE. L’organisme a conçu une simulation sur la ville de Lisbonne et suppose deux types de transports : une flotte de véhicules à six places (« taxis partagés ») permettant des trajets porte à porte à la demande et une flotte de minibus pour huit ou 16 personnes (« taxis-bus »).
Bref, c’est le concept du taxi brousse en ville enrichi de nouvelles technos à la Uber : « au lieu de suivre des parcours fixes à des horaires fixes, (les Taxi-bus) fourniraient un service direct de l’adresse de départ à l’adresse d’arrivée, sur simple pression d’un bouton affiché à l’écran d’un smartphone », lit-on dans la synthèse de l’étude.
Mais comment en arrive-t-on à 90 % de véhicules en moins avec ce système ? Il y a un double effet kiss cool : les véhicules sont autonomes et partagés : ils peuvent donc remplacer les automobiles individuelles…. Comme les transport en commun.
De plus, ils roulent presque à plein temps et ne cherchent pas de place pour se garer… « Une étude par la mairie de Londres a montré que une voiture électrique en partage remplaçait 20 voitures, ajoute le chercheur Pierre Paperon. En un an, une voiture est inutilisée pendant 98 % du temps ». Une aberration qui fleure bon le XXe siècle. Mais, on est au XXIe, non ?
3 | Il y aura plus un peu plus d’espace en ville |
C’est la conséquence directe du point 2 : « Le stationnement public nécessite 95 % d’espace en moins » peut-on lire dans l’étude de l’OCDE. La voirie presque intégralement occupée par la voiture (rues et boulevards, périphériques, places de stationnement, parking…) sera libérée au profit des autres modes de transports (vélo, tram’, piétons…) mais permettra aussi de libérer des mètres carrés en ville pour d’autres usages que les déplacements. Voilà de l'espace pour construire des logements, des commerces, des bureaux et pour édifier des parcs et des jardins. De quoi revitaliser les centre villes comme les faubourgs.
" C’est la fin du modèle hausmannien, commente Pierre Paperon. Mais la politique de la ville doit maintenant changer. Il y a un partage à gérer. On peut tout imaginer, par exemple que les espaces libérés soient occupés par des arbres, des food trucks ou par des couloirs pour les piétons accrochés à leur portables ! Aux Etats-Unis, le nombre de piétons morts en raison de l’utilisation de leur smarphone explose… Il faudra leur fournir un lidar, ce radar de télédétection qui équipe les voitures connectées ! "
4 | Vinci va devoir changer de métier |
Si on n’a plus de besoins de parkings pour garer des voitures, comment les reconvertir ? En jardin souterrain ! C’est l’une des évolutions étonnantes prédites par Pierre Paperon : « La culture hors sol (hydroponie) a de très bons rendements. On est à 200 kg par m2 pour les salades, 30 kg pour les plantes aromatiques ». Voilà le retour annoncé des bonnes vieilles champignonnières. Et Vinci est condamné à se retrouver en concurrence avec des agriculteurs urbains ou à devenir aussi un producteur.
5 | On aura du temps pour vivre (ou travailler) |
Reste à savoir ce qu’on en fera. Pendant que la voiture conduira toute seule, on pianotera sur Excel (mais faut pas être malade en voiture !) ou on jouera à Candy crush ? Ou on chassera les Pokémon sans provoquer d’accidents… A moins qu’on enfile son masque réalité virtuelle pour jouer à Grand Theft Auto XV ! Sinon, on pourra aussi regarder le paysage…
6 | Renault, Citroën et les autres sont condamnées à évoluer ou à mourir |
Il y a cinq niveaux d’autonomie du véhicule. Votre voiture est probablement au niveau zéro (contrôle total du conducteur) ou 1 (avec ABS). Au niveau 2, il y a un régulateur de vitesse adaptatif et un park assist pour se garer sans les mains. Au niveau trois, on peut lâcher le volant en conduisant dans certaines situations. C’est ce que prévoit Renault l’année prochaine dans son film de promo ci-dessus. PSA pareil sur la prochaine 508.
Au niveau 4 (ou 5 suivant les modes de calcul), le véhicule peut circuler sans occupant à bord : c'est ce que prévoit Tesla sur ses modèles pour fin 2017. C’est ce niveau qui permettra la mobilité partagée. Et ce sera une révolution considérable pour les constructeurs.
Car le véhicule partagé, c’est un peu comme le paquet de clopes neutres : la fin de la marque. Fini la différenciation sociale quand on partage tous la même voiture. Quand vous prenez le bus, vous ne savez même pas dans quoi vous roulez. Quand vous hélez un taxi vous ne choisissez pas l’Audi plutôt que la Dacia. Quand vous réservez un Uber, vous n’êtes pas certain de tomber sur une BM.
Alors quand on réservera son véhicule autonome partagé, on sera bien embêté si on veut rouler en Bentley. A moins que des petits malins créent des compagnies premium…
Mais ce sera de toute façon, un changement radical pour les constructeurs. On aura besoin de moins de véhicules et l’acheteur ne sera plus un individu mais Uber… ou la RATP.
Aujourd’hui, un constructeur doit vendre sa voiture à un million de personnes. Demain, il doit construire un véhicule que se partageront cent personnes. On change de perspective et toutes les cartes sont rebattue, explique Pierre Paperon : « Renault va concurrencer EDF et vient de s’allier à Microsoft pour concevoir des voitures connectées, Total a déjà glissé vers la batterie… La bataille économique à venir, c’est clairement l’énergie ».
7 | On récupère du pouvoir d'achat |
La voiture coûte un bras. 3300 euros par an pour être précis. C’est un minimum ajoute Pierre Paperon qui estime qu’on peut atteindre 6000 euros de dépenses annuelles en zone urbaine (rien que le parking à 200 euros/mois plombe le budget).
Quand vous n’habitez pas en centre ville, vous êtes souvent condamnés à cette dépense pour aller au travail en semaine, chez Auchan le samedi et chez mamie le dimanche. Maintenant, combien coûte un taxi électrique partagé ? Un euro les 60 kilomètres. Pas de charges, pas de de salaire. Pour Pierre Paperon, « si le taxi est utilisé sur 24 h, on arrive au coût marginal du prix du ticket métro par course ». Disons 4 euros par jour, soit 1460 euros par an. Le budget transport est plus que divisé par deux. Et si vous habitez dans une zone pavillonnaire en banlieue, vous pourrez, en plus, récupérer le garage.
Le rapport de l’OCDE voit même plus loin en affirmant qu’avec ce système : « les inégalités d’accès aux emplois, aux écoles ou aux services de santé en milieu urbain ont presque totalement disparu ».
Mais si, la robotisation crée de la richesse, elle détruit des emplois et il y aura aussi environ 100.000 chauffeurs de taxi de VTC au chômage…
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