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7 raisons de se passionner pour le microbiome

Savoir Par Eric Le Braz 04 avril 2018

7 raisons de se passionner pour le microbiome

Ballet de bactéries dans l'intestin

Capture Ecran radio Canada
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Le mot est récent mais les recherches prometteuses. Dans notre intestin, nous avons cent mille milliards d’amis qui nous veulent (en général) du bien.

Tout le monde ne le sait pas encore mais on a fait, il y a une dizaine d’années,  une découverte aussi importante que le génome humain dans les années 90. Ce bond en avant de la recherche médicale aura probablement  des répercussions considérables sur notre santé mais aussi, comme les biotechs depuis les années 2000, sur notre économie. Comment résumer cette découverte fondamentale (et bientôt appliquée) ? Une formule abrupte fera l’affaire : notre caca, c’est pas de la merde. C’est même plutôt de l’or en barre.

Depuis le succès tapageur du Charme discret de l’intestin de Giulia Enders (Actes Sud) – 30 semaines en tête des ventes en France ! -, le grand public a appris à connaître un mot qui recèle des trésors de bienfaits (ou pas) : le microbiome, ce nouveau continent à explorer à l’intérieur de notre tube digestif.

Pas la peine de se pincer le nez, on a trouvé un mentor pour nous guider dans cet univers surpeuplé par 100 billions de bactéries. Isabelle de Cremoux dirige Seventure Partners, un fond d’investissement spécialisé, entre autres, dans les sciences de la vie. Son job, c’est de détecter les sciences émergentes qui correspondent à un besoin du marché. C’est ainsi qu’elle est devenue une experte très pédago de ce nouveau champ de recherche et que Seventure a mis en place un fonds spécifique pour investir dans les startup spécialisées dans le microbiome, un mot qui n’existait même pas il y a une dizaine d’années…

1 C’est le nouveau nom de la flore intestinale (mais pas que)

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Evolution chronologique des publications scientifiques sur le microbiome

Seventure

Un peu de grec ancien pour commencer. Micro se traduit par petit et bio par vie. L’avantage du grec, c’est que plus personne ne le parle mais que tout le monde l’adopte et finit par le comprendre. Auparavant, on utilisait souvent le terme de flore intestinale pour décrire le microbiome. Mais on a bien fini par comprendre que les bactéries n’étaient pas des végétaux et qu’elles ne s’épanouissaient pas seulement dans l’intestin. Et même si la métaphore est jolie (et sent bon), elle ne fonctionne qu’en français ! Chaque langue avait son propre mot pour désigner ce nouvel organe. 

Microbiome, c’est donc international mais c’est, of course, aux Etats-Unis que le nom s’impose. Grâce aux progrès de la bio informatique et du séquençage, le  Human Microbiome Project est lancé en 2008 par le National Institute of Health (NIH) américain. Le Projet Microbiote humain en VF consiste à séquencer le génome des bactéries vivant dans notre corps (ou au dessus). Ce projet sur le microbiome est mondial (et la France touche sa bille, on le verra bientôt)

A partir de là, c’est l’explosion des publications scientifiques autour du microbiome comme le montre le graphique ci-dessus. Et encore, il manque l’année 2016.

A quoi servent toutes ces recherches ? Isabelle de Cremoux résume : «  A voir quelles bactéries on a dans l’intestin et en quelles quantités. On peut ainsi repérer la relation entre la composition de la flore et notre état de santé actuel ou futur. » Car tous les lecteurs de Giulia Enders le savent bien, notre santé dépend en grande partie de ce qui se passe dans nos intestins.  "Et si vous corrigez la flore, vous corrigez la maladie", souligne Isabelle de Cremoux. D’où des recherches et des créations de start up. Car pour corriger cette flore de manière préventive ou curative, il faut utiliser de  nouveaux médicaments ou changer sa nutrition. 

2 Microbiote et microbiome : ne pas confondre !

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La part des microbes dans nos cellules  (à gauche) et dans nos gènes (à droite). 

l’American Museum of Natural History

Dans tous les textes traitant de ce nouveau domaine de recherche, on utilise les deux termes qui n’ont pas tout à fait la même signification. « C’est la même différence qu’entre gène et génome », synthétise Isabelle de Cremoux de Seventure.

Autrement dit, le microbiote, c’est  l’ensemble de nos microbes. Et le microbiome, c’est la somme de leurs gènes. C’est aussi l’endroit où vivent ces microbes. Le microbiote, ce sont ces cent mille milliards de bactéries dont la plupart nous veulent du bien. Le microbiome est leur planète.

Comme les humains, les animaux ou les plantes qui se répartissent inégalement sur la terre, les bactéries préfèrent s’installer dans les endroits de notre corps qui leur conviennent. On trouve le microbiote un peu partout sur la peau, dans le nez (900 espèces de bactéries différentes entre les crottes), la bouche, les oreilles, les yeux, les bronches et le vagin si on est une femme. 

Mais c’est surtout dans l’intestin que les bactéries prolifèrent (il y en a dix fois plus que dans le reste du corps) : ici, on est bien protégé des intempéries et il y a de la nourriture à gogo. L’essentiel de la recherche est donc concentré sur ce secteur et quand on parle de microbiome, il s’agit presque toujours de microbiome intestinal. Sinon, on précise microbiome vaginal, buccal, etc. 

3 Tout se joue avant trois ans

Oui c’est comme en psycho. Le développement de notre personnalité et de nos futures névroses se jouent avant trois ans paraît-il. Bon, ça se discute encore chez les psys pour savoir si c’est vrai. En revanche, chez les biologistes on est bien d’accord : le microbiome se construit avant trois ans.

Quand bébé naît, il n’a pas de bactéries. Il est nickel chrome, hyper protégé du monde extérieur par le placenta. Mais dès qu’il perce les eaux, c’est la fête. La flore vaginale enrichie en lactobacilles va nous aider à nous protéger (et à ingurgiter le lait). Si on passe par l’issue de secours avec une césarienne, on aura une immunité moins performante mais les bactéries de la peau de maman et quelques microbes alentour feront l’affaire. Puis pendant les 36 mois qui suivent, bébé va faire connaissance  avec de nouvelles bactéries qui s’installeront dans son intestin et qui seront différentes suivant l’endroit où il vit. « Un enfant qui grandit dans un immeuble n’aura pas la même composition de son microbiome que celui qui  vit à la ferme, explique Isabelle de Cremoux de Seventure. Mais à trois ans, son système immunitaire devient mature et il ferme les portes. Les nouvelles bactéries qui tentent alors d'entrer sont détruites comme s’il s’agissait d’une attaque agressive. »

Plus l’enfant était crados, plus il sera plus fort et diversifié ! On est revenu de l’illusion hygiéniste et de la stérilisation pathologique. Les enfants qui lèchent les sols et qui font les poubelles auront probablement un système immunitaire plus développé que les bébés élevés sous cloche.  Sauf s’ils prennent des antibiotiques car alors, le microbiome est détruit et il faut tout recommencer à zéro pour reconstituer la flore...  

4 On peut le séquencer

Comme un génome, un microbiome est donc très personnel. On a tous intérêt à connaître le sien pour savoir si on héberge des bactéries pathogènes qui peuvent provoquer des maladies cardio-vasculaires, l’obésité, le diabète, la maladie de Parkinson, le cancer, les maladies de peau… Oui tout ça.

Pour connaître le séquençage de son microbiome, c’est facile mais pas donné. Comptez 99 $ aux Etats-Unis et 150 euros en Europe. Et encore, c’est juste une analyse de niveau 1. Pour le niveau supérieur baptisé 16s, comptez 800 à 900 euros. « A l'hôpital, quand on détecte quelque chose d’anormal au niveau 1, on passe au deuxième niveau », raconte Isabelle de Cremoux.

Si vous demandez un séquençage, vous aurez une cartographie qui ressemble à une analyse de sang : êtes-vous dans la norme, au dessus, en dessous ? Dans certains pays, c’est le labo qui fournit les explications. En France, il faut passer par un médecin.  Encore faut-il qu’il ait été formé ! 

5 C’est tendance chez les patients (et bientôt chez les médecins)

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Le microbiome devient vraiment trendy sur Google trends aux USA. 

Giulia Enders a fait un best-seller mondial avec son Charme discret de l’intestin. Et elle ne sera pas la seule à rester dans les annales. 

« Sur Amazon, on a trouvé 2 340 livres avec microbiome dans le titre. (+50 % chaque année)", raconte Isabelle de Cremoux. Plus parlante encore, la comparaison de la recherche du terme microbiome et gluten intelorance aux Etats-Unis sur Google trends (voir graphique ci-dessus). Les courbes se croisent depuis l’année dernière.

Les Etats-Unis se passionnent pour le microbiome et ce n’est pas prêt de s’arrêter. Toutes les écoles primaires de New York sont allées voir l’expo « Meet your microbiome » à l’American Museum of Natural History. 

Résultat, on vit un processus classique dans les innovations de santé. 1) Les scientifiques commencent à vulgariser leurs recherches. 2) Le grand public accroche et met la pression sur 3) les médecins pour qu’ils se forment !

6 C’est un nouveau marché du siècle

Partout dans le monde, des équipes de recherche travaillent sur la modification du microbiome pour soigner ou prévenir les maladies. Plus de 100 produits sont actuellement en études cliniques. Les courbes des publications scientifiques sur les microbiomes répliquent presque à l’identique les progressions des publications sur les biotechs il y a une vingtaine d’années, remarque Isabelle de Cremoux de Seventure.

On estime qu’avant 2030, les thérapies liées au microbiome devraient représenter 10 milliards de dollars. 

Si les Américains sont en pointe dans ce secteur, les Français ne s’en sortent pas trop mal grâce à l’Inra (L’institut national de la recherche agronomique). Pourquoi  sommes-nous si forts ? Ce ce sera l’objet d’un prochain article de 7x7 sur les microbiomes...

7 Un documentaire nous en dit plus

Radio Canada a diffusé en 2015 un excellent documentaire sur le microbiote. Si vous avez une quarantaine de minutes devant vous, on le conseille ! 

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